« Modiano, le plus moderne de nos classiques «
jeudi 29 mars 2012
Un bon écrivain est-il un écrivain mort ? Peut-être. Mais Patrick Modiano est bien vivant après 40 ans de carrière et 25 livres. Consécration, les éditions de l’Herne lui dédient leur prestigieux Cahier. Un hommage dans lequel le romancier s’est impliqué à sa façon.
« Le talent de Modiano paraît indéniable. Qu’en fera t-il ? Ceci est une autre histoire », écrit l’essayiste Emmanuel Berl en juillet 1968 dans la Quinzaine littéraire. Intronisé chez Gallimard par Queneau, il publie son premier roman, La Place de l’Étoile, en avril 1968. Patrick Modiano n’a alors que 23 ans et il exhume les cadavres de la deuxième guerre mondiale, ceux d’une France dont la jeunesse prépare les barricades. Anachronique ? La critique en tout cas s’emballe et le compare à Céline. Vingt-cinq livres plus tard on ne le compare qu’à lui-même et la critique, à de rares exceptions près, fait preuve de mansuétude à son égard. Démiurge, Modiano a bâti sa propre légende, à commencer par son mensonge inaugural : il ne s’appelle pas Patrick et il n’est pas né à Paris en 1947 – mais en 1945 – comme il le prétend au moment de la parution de La Place de l’Étoile. De ses premiers passages confus à Apostrophe à ce Cahier de l’Herne, il contrôle tout et dose homéopathiquement sa présence médiatique, organisant la rareté. Il ne lui manque que la Pléiade pour parachever une œuvre qui se confond avec sa vie.
Par Olivier Bailly
Cahier Modiano, dirigé par Maryline Heck et Raphaëlle Guidée
3 cahiers iconographiques
280 pages – 39 euros