Le 28 janvier 1945, Charles
Maurras fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour haute trahison et intelligence avec l’ennemi. La cour de justice de Lyon entendit ainsi flétrir celui que la Résistance voyait comme la principale source d’inspiration de la politique menée à Vichy. Le verdict eut non seulement pour effet de jeter le fondateur de l’Action française en prison jusqu’à la veille de sa mort, en 1952, mais d’ensevelir sa pensée et son œuvre pour longtemps. L’influence politique de
Maurras s’éteignit alors sur la scène nationale en dépit de quelques tentatives de renouvellement, à l’image des efforts de son disciple, Pierre Boutang, pour adapter le foisonnant corpus et lui rendre vie au quotidien. L’héritage intellectuel du Martégal semblait être l’apanage, dans l’après-guerre, du dernier carré de ses fidèles. Il en va différemment aujourd’hui. Grâce à la distance creusée par le temps,
Maurras retrouve sa place dans les librairies et devient un sujet d’études fécond évoqué dans les colloques universitaires. La thèse magistrale de feu Victor Nguyen,
Aux origines de l’Action française, avait ouvert la voie au début des années 1990. Depuis lors, les publications se succèdent : songeons bien sûr à l’essai stimulant de François Huguenin, naguère intitulé «
A l’école de l’Action française », aux travaux de Jacques Prévotat sur
Les Catholiques et l’Action française, à la biographie si novatrice commise par Stéphane Giocanti chez Flammarion,
Maurras, le chaos et l’ordre, aux écrits de jeunesse de
Maurras, soigneusement annotés par Axel Tisserand… Le beau Cahier que les éditions de l’Herne lui consacrent à présent est une nouvelle pierre à l’édifice, et non des moindres.