Hôtel de la baleine
Herman MelvilleAvant-propos de François L’Yvonnet
Publié à Londres en 1851, Moby Dick est un monument de la littérature universelle. Un classique, au sens où l’entend George Steiner, de ces livres inépuisables que nous ne cessons de lire. Le roman commence par la rencontre d’Ismaël et de Queequeg dans l’Hôtel de la Baleine — extrait que nous donnons ici. Une scène d’anthologie d’un comique grandiose. Le jeune homme est obligé de partager le lit d’un harponneur, un sauvage cannibale idolâtre, qui ne quitte jamais son tomahawk. Fils de roi, il porte en guise de ceinture une rangée de têtes humaines parcheminées. F. L’Yvonnet
« Personne ne souhaite dormir à deux dans un lit, fût-ce avec son propre frère. Je ne sais comment cela se fait, mais on aime être seul quand on dort. Et quand il s’agit de dormir avec un étranger inconnu, dans une auberge inconnue d’une ville étrangère, et que cet inconnu est un harponneur, les objections se multiplient à l’infini. Même en qualité de marin, je n’avais pas plus de raison que n’importe qui de coucher à deux dans un lit ; car les marins en mer ne couchent pas plus à deux dans un lit que ne le font à terre les rois célibataires. Plus je songeais à ce harponneur, plus l’idée de dormir avec lui me répugnait. Il était bien probable que, vu sa qualité de harponneur, sa chemise ou son tricot, selon le cas, ne serait pas des plus frais, ni à coup sûr des plus fins. Toute ma chair s’en hérissait d’avance.»